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Être collégien à Saumur au 17ème siècle

PASSEPORT RECHERCHE 2018-2019

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3.  Les élèves du Collège

Tableau des élèves du Collège identifiés (1608-1685)

Evolution des tarifs d’hébergement

Les élèves du Collège - Version audio - L. DAVEAU / P. EFFRAY / L.-A. GASCHET
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 Si l’autorisation d’ouvrir un collège à Saumur fut accordée par lettres patentes à Philippe Duplessis-Mornay en mars 1593 par Henri de Navarre alors roi de France, ce n’est qu’à partir de 1604 et l’achat d’un corps de logis proche de l’hôtel de Ville que l’on a la certitude que les élèves du collège avaient cours en ces lieux et ce jusqu’à la fermeture en janvier 1685[1].

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Composé dès son origine de 5 classes ayant chacune leur régent, le collège était aussi pourvu de 5 professeurs destinés à enseigner les trois langues (le latin, le grec et l’hébreu) mais aussi la philosophie et les mathématiques.  Le collège avait pour objectif initial d’accueillir les fils des notables de la ville, des nobles de la province et ceux des personnes qui constituaient sa maison ou encadraient la garnison[2]. L’installation de l’Académie et la réputation des professeurs qui enseignaient à Saumur élargirent le recrutement géographique des élèves. Bien que les registres matricules recensant tous les élèves inscrits ne nous soient pas parvenus nous avons pu identifier 227 élèves entre 1608 et 1685[3].

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Sur les 227 élèves que nous avons pu identifier 27 peuvent être socialement rattachés à la noblesse puisque, dans les cas où leurs titres ou ascendances ne sont pas évoqués, ils sont sanctionnés pour avoir porté l’épée.  L’origine géographique des élèves est précisée ou probable pour  28,5 % d’entre eux et nous pouvons constater que la répartition du recrutement correspond pour partie aux provinces qui contribuent financièrement à l’entretien de l’Académie et du collège selon les actes des synodes nationaux de 1632 et 1637[4].

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Outre les droits d’inscription fixés à 3 livres par an, parfois temporairement doublés en période de cherté, les élèves devaient acquérir les livres en relation avec le programme de leur année, les fournitures inhérentes à la pratique de l’écrit, mais aussi des habits. L’attention portée par les enseignants à la bonne tenue vestimentaire de leurs élèves est perceptible dans les premières lettres d’Elie Bouhéreau à ses parents[5].

 

Ainsi, faire ses études à Saumur au XVIIème siècle impliquait des dépenses importantes qui pouvaient être difficiles à supporter selon l’origine sociale surtout lorsque venaient s’ajouter d’éventuelles leçons particulières chez un enseignant et des frais d’hébergement. Comme les étudiants de l’Académie, les collégiens sont alors logés chez des particuliers. S’il est précisé en 1633 que les enseignants et cinq habitants[6] appartenant à la communauté protestante de la ville acceptèrent de modérer le prix des pensions cela montre qu’héberger des collégiens était devenu une activité lucrative pour bon nombre de Saumurois[7] au point que les tarifs avaient doublé entre 1619 et 1664. Cet hébergement était envisagé selon trois formules se différenciant par la quantité et la qualité de l’alimentation proposées mais dans tous les cas les repas se prenaient collectivement à heures fixes, il n’était prévu qu’un lit pour deux et le chauffage, l’éclairage ou le blanchissage étaient facturés en suppléments [8].

 

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[1]Charlotte Duplessis-Mornay, Les Mémoires de madame de Mornay,  édition critique par Nadine Kuperty-Tsur.- Paris, 2010, p. 249 : Sa Majesté «octroya lettres d’érection pour un Collège à Saumur, garny de professeurs es trois langues et es arzs et sciences, promettant de pourveoir, quand la nécessité de ses affaires le permettroit, au bastiment et entretenement d’iceluy». W. Frijhoff, « L’Académie protestante de Saumur et les Néerlandais », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, 123-124, 2016, p. 65, comme J-H. Denécheau (http://saumur-jadis.pagesperso-orange.fr/recit/ch10/r10d5ori.htm) retiennent 1599 comme année d’ouverture du Collège protestant en se fondant sur le financement prévu par l’Edit de Nantes puis affecté pour partie à Saumur l’année suivante par le synode national de Montpellier. J.-P. Pittion,  Histoire de l’Académie (http://archives.ville-saumur.fr/_depot_amsaumur/_depot_arko/articles/801/le-reseau-scolaire-reforme_doc.pdf) opte pour une inauguration en 1601 et une ouverture réelle en 1605.

 Pour les hypothèses de localisation des cours avant 1605 cf. infra : Les locaux du Collège et de l’Académie.

 

[2] Notons que les familles qui constituaient la maison du gouverneur comme celles  des hommes encadrant la garnison se caractérisaient par une identité confessionnelle ne leur permettant sans doute pas de fréquenter les collèges catholiques de la ville au demeurant alors peu réputés. La même logique en partie sécuritaire a d’ailleurs conduit le gouverneur protestant à ne pas loger ses soldats chez l’habitant selon l’usage mais à les établir dans un casernement au sein de la citadelle du château.

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[3]Voir infra le tableau des élèves du Collège identifiés entre 1608 et 1685. Au 235 entrées de notre tableau il faut ôter 6 écoliers que nous retrouvons sur deux années et 2 (les n°59 et 102) qui pourraient également être des personnes déjà recensées sur une année antérieure. Cette identification correspond à l’analyse des registres de l’Académie - lesquels mentionnent principalement les noms des fauteurs de troubles -  des « registres d’état-civil »du Temple, de la correspondance d’Elie Bouhéreau et des rares mentions manuscrites (ex libris ou ex dono) dans des livres du XVIIème siècle conservés à la médiathèque. Nous sommes donc assez éloignés des estimations établies, notamment à partir du nombre de bancs attribués au Temple aux élèves du collège, qui laissent entendre que la fréquentation du collège était supérieure à 300 élèves autour de 1660 (cf. infra : Le Temple, au cœur de l’identité confessionnelle des collégiens). Cette estimation est corroborée par une lettre à son grand-père de Jacques Couët du Vivier du 21 février 1660 citée par E. Itti, [« Lettres d’Elie Bouhéreau, élève de première à l’Académie de Saumur, à ses parents (mai 1684-août 1684) », dans Bulletin de la S.H.P.F., oct-nov-déc. 2008, p. 611] qui rapporte qu’il y avait alors 100 élèves en philosophie et à peu près 50 en seconde (et probablement le même nombre en première) auxquels il faut ajouter les élèves des classes de cinquième, quatrième et troisième. J.-P. Pittion ne retient qu’environ 200 collégiens pour 1641 et 215 pour 1666 dans son Histoire de l’Académie (http://archives.ville-saumur.fr/_depot_amsaumur/_depot_arko/articles/814/surveiller-edifier-punir-la-discipline-au-college-et-a-l-academie-de-saumur_doc.pdf, p.5). Le nombre d’élèves inscrits au collège n’a pas toujours été aussi élevé puisqu’entre octobre 1616 et mars 1618 le minerval – droit d’inscription directement versé à de leurs enseignants par les élèves puis équitablement partagé entre les régents - ne correspond qu’43 élèves pour l’ensemble des trois semestres (AMS, IA1 f° 32 [accessible en ligne p.47]) et au second semestre de 1684 il n’y plus que 20 élèves en première dans la classe d’Elie Bouhéreau.

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[4] A savoir pour 1632 : la Normandie, l’Île-de-France, la Saintonge, le Poitou, le Berry, l’Anjou et la Bretagne. Registre de l’Académie, AMS, IA1 (accessible en ligne p. 471, 482).

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[5] E. Itti (2008) p. 614-622. Les lettres des 8 et 19 mai 1684 témoignent de son impatience et celles des 8 juin et 6 juillet de sa satisfaction, ce qui montre que l’apparence - notamment vestimentaire - était déjà une préoccupation pour un élève et pas seulement pour des raisons d’appartenance au groupe. Précisons que pour les enseignants la bonne-tenue des élèves était également motivée par l’image du Collège et de l’identité confessionnelle ainsi véhiculée dans les rues de la ville.

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[6] Registre de l’Académie, AMS, IA1 f°111v (accessible en ligne p.  206) Le 16 juin 1633 « les sieurs Lasnier et Piger et les dames Mignon, Le Roux, et L'Enfant prendront des pensionnaires à cent cinquante livres par an ». Par recoupement avec les travaux de J.-L. Tulot et B. Mayaud, Les réformés de Saumur au temps de l’Edit de Nantes, ces personnes acceptant de loger des collégiens au tarif « modéré » de 150 livres pour 11 mois semblent toutes issues d’un réseau de solidarité très investi à la fois par engagement confessionnel ou par une certaine proximité d’intérêt avec le Collège ou les enseignants : Lasnier pourrait ainsi être Abraham dont le fils né en 1622 était en âge d’être scolarisé ;  Piger pourrait être Hilaire qui exerçait la profession de praticien (juriste) ;  madame Mignon est sans doute la veuve de Benoist Mignon libraire et bedeau de l’Académie décédé en 1626 ; mesdames Le Roux et L’Enfant sont probablement les épouses respectives de Salomon et Jacques tous deux cadres de la garnison du château et probablement restés fidèles au projet de Duplessis-Mornay après se disgrâce en 1621. De même la « veuve Laisnier/Lesnier » qui est la seule autre logeuse nommée par les registres de l’Académie en 1620 puis en 1653 (AMS, IA1 f°47v et 152 [accessible en ligne p. 77, 291]) est très certainement  l’épouse de Jehan Lesnier régent du collège décédé en 1612.

[7] Une lettre des autorités municipales du 11 mai 1685 déplore que la fermeture de l’Académie et la destruction du Temple aient amené la plupart des réformés à abandonner la ville ce qui cause « une perte considérable ». AMS, BB2 f°134v.

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[8] Registre de l’Académie, AMS, IA1 (accessible en ligne p. 374-376) notamment pour le descriptif des tables. Précisons que pour les fils de pasteurs d’églises locales n’ayant que des revenus modestes les études étaient alors payées par les synodes de leur province d’origine. Sur la question du blanchissage et des chandelles voire également la lettre du 19 mai 1684 d’E. Bouhéreau dans E. Itti (2008) p. 616-61.

Origines géographiques connues des élève
Origine géographique avérée des des élèves
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